« Perugia Cosmico » ou le miracle permanent

Nous sommes au début des années 2000. Le Perugia Calcio, sous la houlette de Serse Cosmi et de la famille Gaucci, a réussi à exister en Serie A en s’appuyant sur des joueurs méconnus. Une hérésie à l’époque.

Par Michaël Klawinski – Twitter: @QuasiKavinsky

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Tifosi devant la fameuse piazza du IV Novembre.

Saison 2000-2001. La Serie A n’avait pas encore repris mais les pronostics allaient déjà bon train. Et une chose était certaine : le Perugia Calcio allait descendre et Serse Cosmi ne tiendrait pas deux mois sur le banc biancorosso. Impossible de miser un kopeck sur cette équipe composée de joueurs venus des divisions inférieures du football italien ou de championnats secondaires voire carrément exotiques. Sans oublier un entraîneur novice dans l’élite qui arrivait du voisin toscan, Arezzo, en Serie C1… Pourtant, en creusant un peu, le dernier coup de folie (en date) signé du président Luciano Gaucci n’était pas aussi dingue qu’il ne le laissait paraître…

Cosmi, cinq montées en dix saisons

La Serie A allait d’abord faire la connaissance d’un drôle de personnage. Un style inimitable avec son combo costard-casquette, une verve intarissable et surtout une énergie débordante sur la touche au point de friser la crise d’apoplexie à chaque match. Alors âgé de 42 ans, Serse Cosmi se lançait dans le grand bain de l’élite. Devenu entraîneur chez les jeunes du côté d’Ellera (Ombrie), dès ses 29 ans, cet ancien défenseur originaire de Ponte San Giovanni, dans la banlieue de… Pérouse, prenait ensuite les rênes de la Pontevecchio, le club de sa ville natale, en 1990. Durant cinq saisons, Cosmi et les siens gravissaient les échelons du football régional. Des performances qui attiraient l’œil d’Arezzo, à la frontière toscane. Un nouveau cycle de cinq ans commencé en Serie D et achevé aux portes de la Serie B (5e de Serie C1B en 99-2000). En dix exercices, le coach comptait cinq promotions à son tableau de chasse.

Forcément, avec de tels résultats et cette forte connotation locale, le pari était risqué mais tentant pour Pérouse. La famille Gaucci sautait le pas en engageant Cosmi à l’été 2000. Sans le savoir, tout ce beau monde allait écrire une des pages les plus savoureuses de l’histoire du Perugia Calcio. Ne manquait plus qu’à bâtir une équipe pour remplir les cases de l’inamovible 3-5-2 du coach perugino…

Comme pour leur entraîneur, les dirigeants allaient écumer les tréfonds du calcio. Avec un certain bonheur. Durant ce premier marché estival de l’ère Cosmi, Pérouse signait le métronome Fabio Liverani et le défenseur Marco Di Loreto (passé par Arezzo entre 95 et 2000, tiens, tiens…) tous deux arrivés de la Viterbese (club de C1 satellite de la famille Gaucci) ou encore le latéral gauche Mirko Pieri (ex-Grossetto, Serie D). Le contingent transalpin était complété par la promesse Manuele Blasi (futur international comme Liverani).

Mais culturellement, Pérouse a toujours été une ville axée sur le « melting pot ». Les Grifoni ne dérogeaient pas à la règle. Deux ans après le coup de maître Nakata, Alessandro Gaucci (fils de Luciano et directeur sportif) et Serse Cosmi passaient l’intersaison à visionner des morceaux de matchs issus des quatre coins de la planète. C’est ainsi que le Grec Vryzas et le Coréen Ahn (responsable de l’élimination de l’Italie au Mondial 2002) débarquaient en Ombrie. La saison suivante, l’Iranien Rezaei, le Grec Dellas ou encore le Nigérian Obodo leur emboitaient le pas. Pour ne citer que les principales réussites. Côté italien, Fabio Grosso, Davide Baiocco (recruté tout jeune par le club mais cantonné à des prêts ou des bouts de matchs avant l’arrivée de Cosmi), Fabrizio Miccoli ou encore Fabio Bazzani explosaient vraiment aux yeux de la Serie A sur la pelouse de Renato-Curi. De la chance ? Il en faut. Du flair ? C’est une évidence.

La bête noire du Milan

Bien sûr, l’avènement du « Perugia Cosmico », a aussi débuté sur une certaine base existante. En 2000-2001, le capitaine se nommait Marco Materazzi (cette saison, il inscrivait 12 buts en championnat, le record pour un défenseur). Le Brésilien Zé Maria enchaînait déjà les aller-retours dans son couloir droit, Andrea Mazzantini les parades spectaculaires et Giovanni Tedesco rayonnait dans l’entrejeu. De ce savoureux mélange découlait un premier exercice achevé à une honorable 11e place, assez loin de la terre promise : la zone rouge. Et à la clé, quelques exploits retentissants comme cette victoire juste avant Noël à San Siro (2-1) face au Milan de Maldini, Gattuso (formé chez les Grifoni) et Shevchenko. Des Rossoneri également battus au retour sur le même score. Cosmi sera invaincu en championnat face aux Milanais pendant deux ans (trois victoires et un nul). Ce même Milan qui sortira Pérouse en demi-finale de coupe d’Italie en avril 2003 sur un but de Nesta (actuel entraîneur du Perugia Calcio). Au tour précédent, Fabrizio Miccoli, étincelant, avait éliminé, à lui tout seul ou presque, la Juve. Lui qui était prêté par la Vieille Dame… Les aléas d’une carrière.                       

Malheureusement, toutes les belles histoires ont une fin. Après avoir terminé 8e de Serie A en 2002 (un 3e tour de Coupe Intertoto et puis s’en va) puis 9e en 2003, la formation de l’Ombrie allait connaître un exercice 2003-2004 terriblement contrastée. Vainqueur de feu la Coupe Intertoto, seizième de finaliste en UEFA, Vryzas et les autres étaient incapables de remporter le moindre match de championnat de toute la phase aller ! Pire, le club se perdait dans un mercato d’hiver alambiqué voire incohérent. Exit Tedesco, Grosso et Vryzas. Pour compenser, Pérouse misait sur d’anciennes gloires (Ravanelli) et certains pré-retraités (Hubner, Di Francesco)… tout en conservant le fils Khadafi (une seule apparition sous la tunique biancorossa)… mais glanait pourtant six victoires. La première, le 22 février, sur le terrain de la Reggina (1-2) ! Suffisant pour arracher une improbable 15e place, synonyme de barrage… contre la Fiorentina, alors en Serie B. La Viola s’imposait à Renato-Curi (0-1) avant d’obtenir le nul (1-1) en Toscane. Clap de fin pour le Perugia Calcio qui n’a plus regoûté, depuis, à l’élite et a même vécu l’enfer par la suite. Rétrogradations, faillites, refonte complète du club, etc… Malgré tout, cette politique de recrutement audacieuse orchestrée par les Gaucci avait créé une mini-sensation en Serie A et avait braqué les projecteurs sur la ville du centre de l’Italie. Une ville qui gagnerait à être plus connue. Un peu comme le Perugia Calcio de l’époque…

Auteur : theosivazlian

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